Friday 3 February 2012

Manuels scolaires – Des ‘stars’ pour motiver les élèves

Les manuels prennent un coup de jeune.
Les manuels prennent un coup de jeune.
 
Poster de stars, extraits de dessins animés, conte de fée… Les manuels scolaires prennent un coup de jeune. La nouveauté. Ces livres sont truffés de belles images de jeunes stars, notamment de Bella et d’Edward de Twilight ou des histoire, dont Le Chat Botté. Hauts en couleur, ils ont été spécialement conçus pour créer plus d’intérêt à la lecture et à l’étude chez l’élève. 
 
C’est la métamorphose. Les classes reprennent des couleurs. Avec les nouveaux manuels destinés aux élèves de Forms I à III, la tendance est de mise. Au plus grand plaisir de nos petits camarades. Les livres sont ‘in’ avec des rédactions à faire sur des people tels Britney Spears, entre autres. Pour démonter le concept de la famille heureuse, une photo de la famille Simpson est utilisée. La proximité avec le monde des élèves est mise en avant pour mieux les encadrer et mieux introduire les différentes matières. Parmi les manuels figurent ceux de l’auteur Lindley Couronne.

Qui pourrait imaginer que l'apprentissage pourrait se faire à partir de manuels tendances? Pourtant, c’est là une transformation sans précédent. Les manuels concernés sont principalement ceux des langues anglaise et française, le Home Economics, la Sociologie et les Sciences. Tous les éléments très ‘in’ ont été réunis pour intéresser davantage les jeunes élèves, allant jusqu'à même donner l’impression que la photographie des personnes qu’on ne connaissait pas, ou des sujets auxquels on ne pouvait se lier, sont des histoires passées.

Les élèves aiment la nouvelle formule
Deux parents, nommément Jennifer Oh-Sheng et Rehaz Daharee, ont accordé la permission pour recueillir l’avis de leurs enfants quant à ce changement dans les manuels scolaires. 

Shane, élève en Form I dans un collège des hautes Plaines-Wilhems, se dit rassurée par la nouvelle formule. « C’est tout plein d’illustrations comme c’était au primaire. De ce fait, la transition s’est bien passée du primaire au secondaire. J’aime bien la présentation des manuels scolaires, car elle aide à mieux comprendre les différentes matières », estime-t-elle.

Farhaan, élève en Form III dans une institution secondaire de la capitale, se souvient qu’il n’y avait pas eu de grandes différences entre ses livres du primaire et ceux qu’il utilise à partir de la Form I. « Il y a beaucoup d’illustrations, beaucoup de couleurs surtout dans les livres d’anglais, de français, des sciences, de Computer et de Design. Bien que je n’aime pas trop ce sujet, je me sens encouragé à le faire grâce à ses illustrations, entre autres », soutient-il.

Ces livres sont certes plus volumineux comparés à ceux des deux années précédentes, mais Farhaan prend plaisir à les parcourir de son propre chef. « Les textes de compréhension dans les livres anglais et français, par exemple, sont tous basés sur l’île Maurice. Ce qui est bien car je m’identifie avec eux tout en apprenant davantage sur mon pays », ajoute-t-il.

« Eveiller l’intérêt des élèves »
Le look tendance des nouveaux manuels scolaires ont pour but d’éveiller l’intérêt des élèves dans les différentes matières, estime Surendra Bissoondoyal, pédagogue et ancien directeur du Mauritius Examination Syndicate. « Plusieurs éléments sont mis en exergue, mais le but est unique : attirer l’attention des élèves.

Bien sûr, par ces moyens, on serait aussi en train de faciliter leur transition du primaire au secondaire », avance-t-il. Mais, en même temps, précise le pédagogue, l’éducation commence à dépendre de moins en moins sur les manuels scolaires. « Les proce­ssus d’enseignement et d’appren­tissage sont en train de devenir de plus en plus dynamiques. On en a certes besoin de manuels scolaires, mais il y a d’autres moyens à l’apprentissage – les jeux éducatifs, l’informatique, entre autres », fait ressortir notre interlocuteur. Il déplore toutefois le fait que les élèves n’accordent pas assez de temps à la lecture. « Il faut les encourager à faire plus de lecture. Par exemple, si les extraits des textes de compréhension sont intéressants, ils vont se rendre à la bibliothèque pour en apprendre plus», indique-t-il.

« Les élèves sont plus développés »
« Les élèves de nos jours ont une personnalité plus développée. Avoir recours à la tendance est un moyen de les motiver dans ce qu’ils apprennent. » Tel est l’avis du sociologue, Rajen Suntoo.  Ce dernier estime que l’accès à l’Internet a joué un rôle prépondérant dans cette « évolution ». Il nous explique que briser le tabou autour des sujets tels que la cinématographie est devenu « normal ». « On ne cache plus les informations. Bien au contraire, on s’en sert à bon escient. C’est suite à des études et à des expériences qui ont prouvé l’utilité de ces méthodes qu’on y a eu recours. C’est tout à fait humain que les gens s’intéressent à des choses auxquelles ils se sentent concernés », avoue-t-il.

Jay Ramsaha : « Une stratégie pour attirer les élèves »
Jay Ramsaha est co-écrivain d’un récent manuel scolaire de Social Studies pour la Form I. Ses collègues et lui-même ont tenu à apporter des changements dans la présentation du livre. Il nous explique le « pourquoi » de ce changement.

> Quelles sont les raisons derrière ces changements  dans votre manuel ?
On s’est basé sur les critères du National Curriculum Framework. Celui-ci préconise une approche holistique, et non l’enseignement classique. Vous verrez que l’approche même des nouveaux livres – quelle que soit la matière – est différente des anciens. Ils sont dotés de nombreuses photographies, illustrations, d’images, entre autres. Certains élèves apprennent mieux à travers ces méthodes. Ce qui fait que le professeur devra aussi adapter sa façon d’enseigner.

> Vous avez parcouru quelques-uns des nouveaux livres. Quelles sont vos impressions ?
Il est clair que la stratégie employée vise à attirer l’élève vers ses livres de classe. Puis, il y a la culture même qui a beaucoup évolué. On essaye d’être plus proche de l’élève en le permettant de s’identifier avec le contenu de ses manuels. Sans oublier qu’auparavant, plusieurs de ces livres étaient importés et ils étaient très différents de notre culture. Cependant, avec la production locale des manuels scolaires, les auteurs tiennent en compte la culture mauricienne lorsqu’ils préparent leurs ouvrages. De ce fait, l’élève se construit à partir de son expérience personnelle, de son style de vie, entre autres.

> Quelle serait l’attitude des parents vis-à-vis de ces nouveaux livres ?
Le temps nous le dira. Car ce ne sont pas tous les parents qui croient que l’apprentissage pourrait se faire autrement qu’à travers l’enseignement classique, soit les livres et les cahiers. Cela se comprend car ils sont habitués à l’éducation classique. Toutefois, ils peuvent se rassurer que le nouveau contenu des livres est bien plus proche de l’enfant. Prenons l’exemple des anciens livres d’anglais et/ou de français. L’accent était mis sur des sujets ‘lointains’. Alors que les récents manuels comptent des sujets, textes de compréhension qui sont très mauriciens. Outre que permettre l’élève à apprendre afin de réussir aux examens, il apprend également des choses qui touchent à sa vie au quotidien ainsi que des valeurs. D’ici les cinq prochaines années, les anciens livres se verront remplacer par les nouveaux.

Des changements très attendus
A en croire Yahya Paraouty, président de l’Union of Private Secondary Education Employees (l’UPSEE), il n’y a pas que le contenu des nouveaux livres qui intéresserait aux élèves, mais aussi leurs vues de l’extérieur. Selon lui, ces changements étaient « très attendus ». « Les pages des anciens livres sont sombres, dont pas attirants pour les enfants qui viennent de quitter l’école primaire. Sans oublier la qualité même du papier qui a tendance à devenir jaunâtre au fils des temps. Les nouveaux livres nous donnent droit à des pages blanches et épaisses. Ce qui encourage l’élève à les parcourir », laisse-t-il entendre.

La nouvelle présentation du syllabus, dira encore Yahya Paraouty, aide certainement aux enfants à mieux comprendre les différents sujets. « Les photographies, les illustrations, les images, les dialogues boxes, entre autres, sont tous de bons outils de travail. Ils aident l’élève à mieux mémoriser les matières. A la Form I, ce sont toujours des enfants. Ils sont toujours plus attirés par les images, que par les mots ,» concède-t-il.

Cependant, le volume des nouveaux livres a augmenté, légèrement, avance le président de l’UPSEE. Il rassure les élèves que c’est dû à l’épaisseur de la page. Et d’ajouter que ces derniers doivent commencer à s’habituer à des livres volumineux car c’est à cela qu’ils seront confrontés dans les années à venir.

Bhishmadev Seebaluck : « Il faut s’adapter à l’ère du changement »
D’autre part, créer l’intérêt de l’élève vis-à-vis de ses manuels scolaires ne se limite pas que de la Form 1 à la Form III.  « SC Without Tears », « SC With Love », SC With Flying Colours », « SC Without Fear » et « SC With a Smile ». Ce sont là la collection de Model Papers en anglais – à l’intention des élèves du School Certificate – de l’écrivain Bhishmadev Seebaluck.

« L’idée derrière de tels titres c’est d’inspirer confiance aux élèves, soit leur faire comprendre que le SC n’est pas la mer à boire si l’on se prépare comme il se doit à l’affronter» , explique-t-il. Souvent, avoue ce dernier, les élèves développent une appréhension par rapport à la langue de Shakespeare car, bien qu’ils aient pu réussir dans toutes les matières, ils ne passeront pas le SC sans avoir réussi en anglais.

« D’un point psychologique, des titres rassurants aident à enlever des frayeurs. A travers mon choix de titres, je fais de sorte que l’élève arrive à comprendre qu’il ne faut pas approcher le sujet avec appréhension. Il faut plutôt développer l’amour pour l’anglais afin de pouvoir le réussir », poursuit-il.

Les changements qu’a apportés Bhishmadev Seebaluck au cours de ces trois dernières décennies (son premier manuel « SC Without Tears » datant de 1982), ne se limitent pas qu’au choix judicieux de titres. Il a également dû innover au niveau de ses passages de compréhension. Tantôt basé sur des leçons à retenir, tantôt sur des aventures qui intéresseront sans doute les ados, l’écrivain a dû adapter ces passages à des sujets contemporains.

« Il s’agit encore une fois d’un choix important dans la mesure où ces passages de compréhension doivent être attirants pour l’élève. Des leçons de la vie, des aventures, agrémenter leur connaissance générale, les inciter à la lecture en leur introduisant des  extraits de livres tels que Da Vinci Code, entre autres, et leur donner des idées pour rédiger des « essays ». Voilà un peu ce que je cherche à faire à travers de mes manuels », précise Bhishmadev Seebaluck.

Notre interlocuteur confirme que, tout comme tout autre livre, la couverture d’un manuel scolaire est décisive dans le sens où il encourage ou décourage l’élève à l’ouvrir. « Sur la couverture de « SC With a Smile », vous verrez des jeunes, souriants, qui se tiennent debout devant une institution éduca­tionnelle. Nos élèves peuvent facilement s’identifier avec ces jeunes sur la photo, et surtout se laisser guider par la confiance qui émane d’eux.

La photo est, soulignons-le, également prédominée par la pelouse, soit la couleur verte – la couleur de l’espoir. Puis, il ne faut pas oublier que les gens veulent avoir « value for money ». Il faut bien faire travailler son ima­gination si l’on veut innover. Pour Bhishmadev Seebaluck, il n’y a pas de doute que le manuel scolaire doit être Student-Friendly. Car, après tout, « ce dernier va l’accompagner tout au long de son année scolaire ». 

Témoignages
L’effet escompté auprès des élèves ?

Le nouveau concept de l’apprentissage attire-t-il nécessairement tous les élèves ? Il semble que non. Vidhwantee Aubeeluck, mère de Bhavna, élève en Form I, et Rani Siraz, mère de Yogveer, élève en Form II,  nous ont autorisé d’en savoir plus auprès de leurs enfants.

• Bhavna : « J’ai été surprise de trouver le poster d’un héros hollywoodien dans mon manuel de français. A l’encontre de mes autres camarades de classe, cela ne me dis pas grand-chose. Peut-être que j’aurais aimé si mes stars favorites y figuraient. Par contre, j’aime bien mon livre de science. Il y a des dessins de petits garçons et petites filles, tout comme on les voit dans les dessins animés. »

• Yogveer : Effectivement, il y a des exercices ‘Remplacer les tirets’ que nous devions répondre à partir des posters qui nous sont proposés. Je n’aime pas ce genre d’exercice car il me faut aller faire de la recherche sur Internet. Cependant, j’adore les exercices basés sur les dessins animés. Je m’y connais. Je n’ai pas à aller faire des recherches pour pouvoir répondre à ces questions. Cela dit, ce n’est pas nécessaire d’avoir devant moi des posters de héros ou d’extraits d’histoires ou des images des dessins animés pour aimer une matière. La preuve : il n’y a pas de ces choses dans mon manuel d’anglais ; mais j’aime bien l’apprendre. N’empêche, je serai ravi d’avoir des exercices sur des dessins animés et/ou le sport. » 

Source: DéfiMédia
Priyadarshinee Luckoo

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